ANONYME

Ils ont acheté toute la ville, je crois. Je les vois remonter à bord par ma lucarne, les bras chargés de paquets colorés et clinquants. Moi je suis là, dans le noir, noir de crasse, avec mes idées noires. Je ne les envie pas, moi je voudrais juste pouvoir travailler, avoir un petit logis chauffé pour Adéla         ïde et moi, qu’elle ne se couche pas avec la faim, qu’elle puisse porter une robe rouge qu’elle aurait choisie. Juste çà. Juste être libre de sortir et de voir la lumière bleue du matin, la lumière jaune du soir. Juste manger quelques fruits colorés. Juste voir du rose aux joues d’Adélaïde.

Je vais devoir attendre et rester tapi. J’entends Pauline être interrogée sur un foulard de soie grise et une veste noire. Je l’entends se taire. Je l’entends me protéger. Elle n’a pas de paquets colorés et clinquants. Son regard se tourne vers l’eau bleue souillée par ce paquebot.

CE SITE A ÉTÉ CONSTRUIT EN UTILISANT